samedi 4 juillet 2015

La maison Philibert de Jean Lorrain aux éditions Crès, illustrée par Dignimont.


Il n'aura pas échappé aux lecteurs du blogue que cette semaine fut entièrement consacrée aux belles éditions illustrées du 20eme siècle, présentées dans leur plus simple appareil, c'est-à-dire brochées ! Le cuir tient chaud en ces temps de canicule… Voici aujourd'hui un ouvrage fort bien illustré par Dignimont dans la "Collection des Arts" de la Maison Crès et Compagnie à paris en 1925. Les dessins ont été superbement coloriés par Charpentier.


Si l'on se réfère à la spécialiste de l'œuvre, Noelle Benhamou, , ce roman est le sixième roman de Jean Lorrain. C'est sans doute l’un des plus connus du grand public. Il occupe une place particulière dans la production de l’écrivain qui ne le considérait pas, cependant, comme l’un de ses préférés. On sait que l’écriture de ce roman avait été motivée par un besoin d’argent, l’œuvre étant destinée à acquitter le montant d’une amende et à éponger une lourde dette. Les événements vécus par Lorrain l’année précédant la publication de La Maison Philibert sont éclairants.


En effet, Mme Jeanne Jacquemin qui s’était reconnue dans une chronique de Lorrain lui avait intenté un procès pour outrage à la vie privée et diffamation. L’homme de lettres avait été condamné à verser à la plaignante 50 000 francs de dommages intérêts, 25 000 francs d’amende et à purger deux mois de prison.


S’il évita l’incarcération en raison d’un retrait de plainte tardif et sans doute négocié, il subit d’importantes pertes financières, ainsi que le quotidien où avait paru le texte incriminé. C’est donc à la demande de Henri Letellier, directeur du Journal,que Lorrain écrivit La Maison Philibert.


Roman construit en trompe-l’œil, La Maison Philibert mêle le vrai et le faux, le cru et le faisandé , le rire et les larmes, la fiction et le fait de société à travers le miroir déformant de la création littéraire dans une écriture pittoresque où domine l’argot. À la limite parfois du compréhensible pour un non-habitué de la langue verte, cette œuvre n’en a que plus de charme. Étrange monstre que cette œuvre ! Derrière les volets que clôt une pensionnaire, se cache un monde à découvrir. Le lecteur est ainsi invité à pénétrer sur la pointe des pieds dans le monde d’en bas, où il perdra ses illusions sur la vie…


Le roman est construit avec une méthode particulière, proche de l’entrelacement. Il alterne les chapitres dont l’action se situe en province, dans la maison Philibert, et ceux qui prennent pied à
Paris, où se rend régulièrement le patron d’Aubry-les-Épinettes. À la multiplicité des personnages, s’ajoutent les intrigues secondaires.


En effet, si le lecteur suit les heurs et malheurs de Philibert, sympathique tôlier qui exerce son métier à la papa, et finit par périr sous les coups d’un jeune chef de bande teigneux et cruel, il est confronté à plusieurs histoires : celle de la Mélie et de son julot Thomas, qu’elle fait assassiner par l’un de ses admirateurs qu’elle manipule ; des cambriolages chez des gens riches ; les crimes inexpliqués causés par les caprices sexuels de gens "de la haute". Le roman culmine avec le chapitre « Le Bal des Vaches », véritable morceau de bravoure qui donne la clé du milieu. Comme dans un roman policier, tous ces événements finissent par se rejoindre à travers l’enquête de Ménard qui délie les ficelles de cette vie viciée… De quoi réjouir un bibliophile avide d'idéal quand ce dernier n'est pas dans la reliure ou l'illustration ! Pierre


LORRAIN (Jean). La maison Philibert. Paris, Collection des Arts, Crès & Cie, 1925. Un volume in-4.  Broché, couverture rempliée. 254 pp. 88 aquarelles de Dignimont, coloriées au pochoir par Charpentier. Tiré à 365 ex., 1 des 300 sur Rives (N°350). Très bel exemplaire. 330 € + port

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