lundi 2 juillet 2012

Cours d'hygiène professé au Val de Grâce par A. Laveran, futur Prix Nobel...

Je ne suis pas un spécialiste des manuscrits (on finira par se demander de quoi je suis spécialiste, en fait !) mais un cours d'hygiène de Laveran pris par un élève à l'écriture régulière (à l'anglaise) est une occasion que je n'avais pas laissé passer, il y a déjà quelques années.

Je rappelle que Charles Louis Alphonse Laveran (1845-1922) fut un médecin militaire et parasitologiste français, pionnier de la médecine tropicale, connu pour avoir découvert, en 1880, le parasite protozoaire responsable du paludisme. Pour la première fois était mis en évidence que les protozoaires pouvaient être la cause de maladies. Ses travaux sur les protozoaires lui ont valu d'ailleurs de recevoir le prix Nobel de médecine de 1907.

Le cours d'hygiène que je vous propose semble avoir été retranscrit à la fin du XIXeme siècle car les références à la guerre franco-prussienne de 1870 sont nombreuses. Je rappelle que Laveran étant médecin militaire, et que c'est donc tout naturellement que ce cours d'hygiène s'adresse à l'armée…

Sont évoqués la physiologie du trouffion, sa conformation, ce qu'il incurgite, ce qu'il décurgite, l'hygiène et l'inspection des denrées animales ou d'origine animale qu'on lui propose (matière médicale qui a vu les amphithéâtres assister à mes plus belles siestes éveillées), la ration du militaire, sa tenue et son paquetage…

Voici quelques extraits pleins d'enseignements :

- Charge maximale du cheval des dragons = 135,984 kg (le poids moyen du cavalier dépasse rarement 65 kg). Chez les anglais, la charge est de 120 kg …
- La plaque d'identité a été adoptée par les allemands en 1870 pour les familles ignorant le sort des leurs.
- Le campement sous la tente établi depuis toujours a été supprimé par Napoléon qui pensait que le montage et le démontage de la tante était du temps perdu. Il fut rétabli pendant la guerre d'Algérie et supprimé de nouveau en 1872 après la défaite de 1870.
- Les lieux d'aisance et leur étude ne prennent pas moins de 20 pages dans ce traité. Il semble que, depuis toujours, l'homme ait tendance à uriner sur les bords de la cuvette ce qui entraîne notre scientifique à en proposer la suppression.

J'en termine avec l'assainissement des champs de bataille. La lecture de cette partie m'a amené à pondérer ma peine sur les malheurs des militaires du XXIeme siècle. Après la bataille :

On commence par enlever une couche superficielle de terre
On croise les couches de cadavre en ayant pris soin préalablement de les déshabiller
On arrose d'acide phrénique pour l'odeur
On recouvre les corps de goudron de houille, paille et branchage
On met le feu avec l'inconvénient de produire des gaz irritants même à grande distance
Pour la bataille (capitulation) de Metz, on a utilisé de la chaux vive avec succès…

Et puis le manuscrit s'arrête là, après 342 pages ! Il reste 40 pages blanches qui n'ont pas été noircies à l'encre de ces cadavres… Je me suis demandé si cet élève médecin n'avait pas, comme moi, été désarmé devant tant d'horreurs. Ce rouge garance du képi des médecins militaires rappelle trop la couleur du sang… Pierre

LAVERAN. Cours d'hygiène professé au Val de Grâce par A. Laveran. Manuscrit. Fin XIXeme. 342 pages format in-8. Belle reliure demi basane verte, roulettes et titre dorés. En très bel état. Vendu

1 commentaire:

Pierre a dit…

Je confirme qu'il s'agit de l'écriture d'un des élèves de Laveran. Lui même écrivait comme un protozoaire... Pierre