mercredi 30 mars 2011

Les colloques d'Erasme, édition du Pot Cassé. Scripta Manent


Desiderius Erasmus Roterdamus dit "Erasme" (1469-1536) : Rien ne destinait ce hollandais de Rotterdam à devenir une des plus grandes figures de son temps. Pour le placer dans l'époque, sachez qu'il est contemporain de Rabelais et de Léonard de Vinci. Période Renaissance, donc…

À l’âge de dix-sept ans, il prend le nom sous lequel il va devenir célèbre : Desiserius Erasmus (le désiré très aimé). Cela prouve déjà qu'il avait le sens de l'humour car son père était, quand même, ecclésiastique.... Après une vie monastique où il accumule un savoir encyclopédique, il est nommé prêtre à vingt-cinq ans et se sent prêt à se mesurer à l’obscurantisme de l'époque. Sa vie sera dès lors jalonnée de longs voyages à travers l’Europe, de l’Italie vers l’Angleterre en passant par la France.


Entre 1500 et 1503, il publie les Adages et le Manuel du Soldat Chrétien, qui propose une réforme catholique, fondée sur la charité. Il s’attelle ensuite à une traduction du Nouveau Testament à laquelle il consacrera une dizaine d’années. Il séjourne longuement en Italie, où la publication de ses Adages ainsi que ses éditions d’auteurs grecs le classent parmi les plus grands savants de son époque. Puis il retourne en Angleterre chez son ami Thomas More où il y rédige en quelques jours son fameux Éloge de la Folie, joyeux texte iconoclaste sur la philosophie.

Suivant la définition des stoïciens,
la sagesse consiste à prendre la raison pour guide;
la folie, au contraire, à obéir à ses passions;
mais pour que la vie des hommes ne soit pas tout à fait triste et maussade
Jupiter leur a donné bien plus de passions que de raison.


Il retourne ensuite aux Pays-Bas et fait de nombreux séjours à Bâle, où il prépare l’édition de sa traduction de la Bible. Cette publication va déclencher l’hostilité des théologiens réactionnaires qui condamnent tous les hellénistes et exégètes partisans du recours direct à l’Évangile. Cependant, l’influence grandissante de Luther embarrasse Érasme : On lui reproche d’avoir "couvé l’œuf" et d’être responsable de l’active "hérésie luthérienne" qui se développe. Les deux camps, celui des Réformés et celui des tenants du catholicisme traditionnel, l'obligent à prendre position. Érasme plaide l’unité et la réconciliation. Nous avons à faire à un humaniste pacifiste, rappelons-le.


François Ier, fasciné par cette figure hors du commun, cherche à l’attirer à la Cour, mais Érasme veut avant tout rester indépendant et refuse toutes ses invitations. En 1521, il quitte définitivement les Pays-Bas et s’installe à Bâle. C’est là que commence sa querelle avec Luther, à coups d’essais philosophiques. Derrière les deux champions se cristallisent des regroupements qui annoncent les guerres de religion. Il refuse cependant de prendre parti et proclame que l’Europe doit s’unir (toujours d'actualité) et que l’Église doit tout faire pour retrouver son unité perdue. Face à la montée de l’extrémisme (idem), Érasme est obligé de fuir à Fribourg.


Il ne reviendra à Bâle passer la dernière année de sa vie. Ses derniers jours furent ceux d'un sage. Sa sérénité ne se démentit jamais, et il accueillit ses amis avec une bonne grâce imperturbable. Par son testament, il léguait tout ce qu'il possédait "aux pauvres vieux et infirmes, aux jeunes orphelines et aux adolescents de belle espérance". Toute la ville de Bâle suivit ses obsèques derrière l'université. Il est enterré dans la cathédrale.


Érasme ne fut pas seulement un philologue et un théologien, ce fut aussi un littérateur. Par l'importance de leur auteur, par leur genre et leur objectif, les Colloques (Colloquia, Bâle, 1516) d'Érasme sont les textes les plus représentatifs de l'esprit des humanistes du XVIe siècle. Érasme n'est-il pas le plus connu de ces intellectuels chrétiens, à la fois critiques et idéalistes, qui croient en la force de l'éducation ? Ces dialogues (conversations), présentés sous une forme pseudo-théâtrale et inspirés de l'Antiquité, sont destinés à faire réfléchir sans ennuyer. Ils s'adressaient non seulement aux écoliers mais aussi à un public plus large. Ces textes savoureux, présentés avec bon sens et même avec humour, n'étaient pourtant composés que pour apprendre à devenir d'honnêtes hommes ou d'honnêtes femmes. A relire, donc… Pierre


ERASME. Oeuvres. Le premier - deuxième - troisième - quatrième livres des colloques. Traduit du latin par Jarl-Priel, illustré par Albert Puyplat. (complet en quatre volumes). Paris, Editions A l'enseigne du Pot Cassé, 1934, 1934, 1935 et 1936. Brochés, couverture illustrées, 286, 286, 252 et 254 pages, 12cm x 18cm, intérieur propre (non coupé). Exemplaires numérotés sur papier de Bornéo. Traduit du latin par Jarl-Priel. Avec les illustrations (bois gravés) (portrait, frontispices, bandeaux, lettrines) de Albert Puyplat. Les troisième et quatrième volumes sont illustrés par A.-F. Cosÿns. Etat parfait. 90 € les quatre volumes + port

mardi 29 mars 2011

Le journal d'Anaïs Nin ou une écrivaine à l'âme dilatée...

Je me posais dernièrement la question se savoir si, dans ma boutique plutôt dédiées aux livres anciens et majoritairement antérieurs à la première guerre mondiale (mais sans rapport avec elle), je devais continuer à proposer des ouvrages d'auteurs modernes démodés. Car j'ai, quand même, un problème de place, figurez vous !

Tentons un essai avec Anaïs Nin…

Anaïs Nin est un cas. Elle se raconte. Par le menu. Tout comme Montaigne qui écrivait "Je n’ai d’autre objet que de me peindre moi-même" .Elle, a commencé à 11 ans et ne désemplira pas les pages jusqu'à la fin de sa vie. Ce qu'elle cherche en elle est probablement trop secret pour que les hommes puissent y comprendre quelque chose. Les femmes, peut-être ? Un nuage sulfureux plane autour d'elle et Henry Miller, son compagnon de frasque et d'écriture, n'a rien fait pour édulcorer cette réputation. Aucune femme écrivain (écrivaine) n'aura évoqué ces plaisirs qu'on nomme, à la légère, physiques avec une telle absence de scrupules. Elle témoigne dans le domaine de la confession à mettre son âme dilatée à nu, d'une belle détermination. Pas moins de 6 volumes de son journal à la vente, aujourd'hui, et il me manque le septième et dernier volet qui s'y adosse.


Le sexe est pour Anaïs Nin, la clef du monde. En prenant du recul, avec l'age, je réalise qu'elle a entièrement raison… mais elle oublie que la raison est le bouclier des comportements animaliers chez la plupart d'entre nous. Certains sont plus raisonnables que d'autres, voilà tout. Il y a dans cette accumulation d'amants entrecroisés, une quête narcissique presque pathétique. En fait, l'intérêt de son journal réside surtout dans la description du milieu littéraire français et américain de la première moitié du XXeme siècle. Vous y croiserez Henry Miller, Antonin Artaud, Pablo Neruda, Marcel Duchamp, Supervielle, Salvator Dali, Truman Capote, Romain Gary, Tenesse Williams et bien d'autres…


Anaïs Nin restera cependant dans nos mémoires, moins le témoin du monde littéraire du XXeme siècle qu'une égérie de l'émancipation féminine de cette époque. A-t-elle encore un lectorat ? Je vous le dirai et en tiendrai compte dans mes présentations futures…Les ouvrages que je présente à la vente attireront, peut-être, un peu plus votre curiosité si je vous précise qu'une documentation photographique importante est associée au texte. Pierre


NIN Anaïs. Journal établi et présenté par Gunther Stuhlmann. * 1931-1934. ** 1934-1939. ***1939-1944. ****1944-1947. *****1947-1955 ****** 1955-1966. En 6 volumes. Paris Stock. Ouvrages brochés in-8. Bon état général. Le lot : 70 € + port

lundi 28 mars 2011

Causerie du lundi de Philippe Gandillet. Les éditions du Visorion.

Impose ta chance
Serre ton bonheur et va vers ton risque
A te regarder, ils s'habitueront…

Cette citation de Bertrand Touvenel a dû porter le projet de reconversion de notre libraire tarasconnais comme elle doit porter, aujourd'hui, celui de Pascal Marty, un lecteur du blogue, qui s'est pris de passion pour la typographie et qui nous présente sa dernière réalisation.

Je le laisse mener l'article à sa façon. C'est très technique tout ça et il y encore peu de temps, je confondais "police" et "caractères"…

Au départ, il y a eu un bouquin chéri, Les Chapardeurs de Mary Norton, avec ses magnifiques illustrations de Lars Bo, cru perdu puis retrouvé et dont je me suis décidé à faire une réédition numérique à l’identique (en recomposant tout dans InDesign, au cas où) après m’être aperçu en parcourant Internet qu’il ne courait plus les rues. Il y avait aussi l’idée de pouvoir en faire profiter des amis qui n’avaient pas la chance de posséder l’ÉO.


Peut-être un an plus tard, il me toque de lire les Essais de Montaigne dans le texte. J’aime bien la saveur que prend un texte ancien dans sa stricte version originale. Et que je te rapatrie une version trouvée sur Google ou Gallica, je ne sais plus. Mais vous savez ce que valent ces numérisations ;-)) Une fois imprimées elles sont tellement moches qu’elles vous couperaient plutôt l’envie de lire. Alors, me dis-je, pourquoi ne pas faire pour Les Essais ce que j’ai fait pour les Chapardeurs ? J’épluche les caractères dont je dispose. Je trouve un Caslon pro de chez Adobe qui se rapproche de bien près de l’original et possède le s long et pas mal de ligatures. Je parviens à me fabriquer les lettres qui manquent, genre e ou q tilde. Je fais quelques essais pour déterminer corps, approche et interlignage, et c’est parti ! Ligatures et lettres bizarres sont installées dans une petite casse numérique à déplacer de page en page pour pouvoir les récupérer facilement par copier-coller. Heureusement que c’est écrit gros et que les pages ne sont du coup pas trop remplies, parce que, rien que dans le Premier livre, il y en a quand même 500 !…


Pour ce qui est de la frise et de la lettre grise (on dirait aujourd’hui la lettrine) de la première page, je dois bien me rendre à l’évidence qu’il ne sera pas possible d’utiliser les versions numérisées récupérées. Elles sont tellement pourries qu’elles feraient vraiment trop vilaine figure à côté de l’aspect impeccable de la fonte numérique. En somme, mon seul choix est de les redessiner à la main. Si ç’avait été des gravures sur cuivre j’aurais été fort ennuyé car le travail aurait dépassé mes compétences. Mais c’est des bois de fil, c’est donc envisageable, et après quelques tentatives plus ou moins laborieuses je finis par obtenir un résultat acceptable.


Et finalement, au bout de trois mois de boulot, je dispose d’une belle recomposition à l’identique du Livre premier des Essais. Un peu plus petite que l’original dont les pages mesurent 30 cm de haut, certes, mais où tout est exact : Orthographe (d’autant plus piégeuse que le même mot peut parfois être orthographié de trois manières différentes sur une même page), règles de ponctuation, disposition des espaces et même… coquilles ou erreurs de foliotage (et elles sont nombreuses).


Mais puisqu’il y avait au moins un farfelu (moi) pour avoir envie de se retrouver dans la peau d’un lecteur du XVIe sans avoir à se mettre en quête d’une Édition Originale introuvable ou proposée de toutes les façons à un prix à cinq chiffres, j’ai supposé qu’il pouvait peut-être s’en trouver d’autres, dans le vaste monde des gourmands de la langue française. C’est pourquoi j’ai décidé de tenter de créer les éditions du Visorion , avec la perspective, au delà de ce Montaigne, de rendre accessible au Public (j’adore le côté vieux style que prend le public dès qu’on lui rajoute une cap) , un certain nombre d’ouvrages qui ne se bousculent pas, et pour cause, sur les rayonnages des libraires d’ancien.


Et comme de nos jours, dès qu’on a une idée c’est sur Internet qu’il faut la présenter, mon premier soin a été de mettre en ligne un site. Et comme de nos jours, pour qu’un site marche, il faut lui adjoindre un blogue, j’ai donc adjoint. Mais à vrai dire j’espère que ce blogue (De choses sues ou oubliées) fera d’abord plaisir à tous les doudingues dans mon genre, amoureux de la langue, de la littérature et des livres, et curieux aussi du rapport que ces choses entretiennent avec l’art technique qui les lance – encore – dans le monde, à savoir l’imprimerie.

Ah, au fait !! Le visorion c’est le support que le typographe installait sur sa casse pour avoir sa copie à hauteur d’œil. Pascal Marty


Il faut de l'audace pour entreprendre un tel projet. Les bibliophiles qui animent les blogues en ont tous. Hardiesse, courage, bravoure, vaillance, témérité, assurance, aplomb, fougue, culot sont de jolis mots, aussi… Votre dévoué. Philippe Gandillet

samedi 26 mars 2011

Marcel Capy, illustrateur de Daudet chez Kra, éditeur.


La fin du 19eme siècle et le début du 20eme ont vu naître une jolie couvée d'illustrateurs, de peintres et de graveurs qui se sont mis au service de l'édition et de la littérature. Il faut dire que les progrès croissants des techniques d'imprimerie, la jolie qualité des papiers proposés à cette époque, la mode des beaux ouvrages et le temps libre* dont disposaient les gens pour leurs loisirs (dont la bibliophilie) se prêtaient à mettre en valeur le talent des artistes.


* Je ne dis pas que nous n'avons plus de temps libre pour la lecture, aujourd'hui. Je dis que la présence omniprésente des moyens d'information et de communication nous empêche de nous occuper de nous-même. Et puis, il faut s'occuper des enfants, faire la cuisine, ranger la maison, le jardin…autant de passe-temps agréables que nous avons arraché, de haute lutte, à l'emprise des femmes.


La carrière de Marcel Capy (1865-1941) a ceci de particulier que ce dernier a connu le succès très tôt. On pourrait le classer parmi les illustrateurs de la belle époque à côté des "Steinlein" mais il n'a pas laissé son nom au fronton de notre mémoire… Et pourtant ! Sa carrière commence véritablement en 1899, à la création du Bon vivant. Ses dessins paraissent dans tous les journaux illustrés de l'époque, du Rire au Sourire, en passant par Comoedia, Fantasio, ou encore La Baïonnette où il collabore au numéro qui publie les planches de Gus Bofa pour Le Livre de la Guerre de cent ans. Il illustre Alphonse Allais, Courteline et, pour les éditions Kra, la trilogie d'Alphonse Daudet que je vous présente aujourd'hui à la vente.


Pour Francis Carco, Marcel Capy est "le prince de l'attroupement" et "déroule à ses pieds la scène classique du scandale au café, de l'événement au bord du fleuve, l'incident de la queue devant le guichet de la gare, à l'arrêt de l'autobus ou aux portes du théâtre." Ses personnages à mentons énormes expriment "l'âme bourgeoise et populaire, la manie sentencieuse et le mépris facile." Sternberg rapporte que Chaval lui avait confié "s'être inspiré des personnages de Marcel Capy, de leur faciès linéaire, anguleux et patibulaire." Capy, quant à lui, affirmait tout simplement dessiner pour "ne pas s'embêter." Son côté dilettante a nui à sa notoriété. Habitué de divers cercles littéraires et artistiques tels ceux des Hydropathes, des Incohérents et du cabaret du Chat noir, il a fourni des illustrations humoristiques à plusieurs revues, souvent satiriques, dont Le Chat noir . Un homme du 19eme siècle, donc…


C'est pourtant avec les illustrateurs du 20eme siècle que nous le classons souvent, tant ses dessins sont modernes. Je vous soumets quelques noms de ses contemporains plus ou moins célèbres et vous verrez que, vous-même, vous le classerez avec eux. Joseph Hémard (1880 - 1961) / Jacques Touchet (1887 - 1949) / Claude Chopy (à compléter) / Albert Dubout (1905 -1976) / Umberto Brunelleschi (1879 - 1949). J'ai déjà présenté certains d'entre eux sur le blog et je réalise que la liste de ces illustrateurs talentueux est à faire. Vous pouvez m'aider ;-))


Les trois ouvrages que je vous présente sont d'une extrême cohérence pour ce qui est des reliures. L'ancien propriétaire a attendu que les éditions Kra aient sorti la trilogie complète pour demander à un professionnel (qui a gardé, conformément à la mode, les plats et le dos – ce qui se discute pour ce dernier élément) de les habiller de façon élégante et homogène. J'aime beaucoup ces trois ouvrages, je dois le reconnaître, et les grandes gueules des personnages de Marcel Capy se marient, ici, parfaitement avec celles de nos héros… Pierre


DAUDET (Alphonse). Tartarin de Tarascon. Illustrations en couleurs de Marcel Capy. Paris, Kra, 1928. Format in-8 carré, 3ff.-214pp.-3ff.- Dos conservé. Demi-maroquin rouille à coins, faux-nerfs, couverture et dos conservés, tranche supérieure dorée, les autres tranches non rognées (Reliure de l'époque). Collection Poivre et Sel. Nombreuses vignettes dans le texte, coloriées au pochoir par les ateliers Jacomet. Premier titre de la collection, tiré à 1000 exemplaires. Exemplaire N° 93 sur vélin de rives.

DAUDET (Alphonse). Tartarin sur les Alpes. Illustrations en couleurs de Marcel Capy. Paris, Kra, 1930. Format in-8 carré, 2ff.-229pp.-2ff.- Dos conservé. Demi-maroquin rouille à coins, faux-nerfs, couverture et dos conservés, tranche supérieure dorée, les autres tranches non rognées. Collection Poivre et Sel. Nombreuses vignettes dans le texte, coloriées au pochoir par les ateliers Jacomet. Deuxième titre de la collection, tiré à 1000 exemplaires. Exemplaire N° 959 sur vélin de rives.


DAUDET (A.). Port-Tarascon. Illustrations en couleurs de Marcel Capy. Paris, Kra, 1930. Format in-8 carré, 2ff.-235pp.-2ff.- Dos conservé. Demi-maroquin rouille à coins, faux-nerfs, couverture et dos conservés, tranche supérieure dorée, les autres tranches non rognées. Collection Poivre et Sel. Nombreuses vignettes dans le texte, coloriées au pochoir par les ateliers Jacomet. Troisième titre de la collection, tiré à 1000 exemplaires. Exemplaire N° 529 sur vélin de rives.

Ces trois ouvrages, en très bel état, sont proposés, ensembles. Vendu. Vous comprenez bien que serait la mort dans l'âme et sous la menace que je vendrais ces exemplaires séparément…

jeudi 24 mars 2011

Catalogue des ouvrages en langue italienne parus avant le XVIIIeme siècle par Nicola Francesco Haym.


Un débat intéressant sur l'évolution (ou la disparition) de la profession de libraire s'est déroulée sur le blog du bibliophile, ces derniers temps. Un jeune ingénieur idéaliste, humaniste mais non désintéressé en est la cause. Désireux de mettre en place un nouvel outil informatique adossé au marché du livre ancien en SVV, il crée l'émoi dans un monde peuplé, semble t-il, de quelques libraires qui ont choisi cette profession pour se défaire, justement, des contraintes inquiétantes du progrès. Il me rappelle Hugues, en plus jeune… (bon, je ne connais pas Hugues mais j'imagine que c'est un vieux Monsieur cacochyme accroché à ses maroquins aux armes !).


A cette occasion, certains libraires et non des moindres se sont posés la légitime question de savoir si, la valeur ajoutée de la fiche d'un livre disparaissant avec sa mise en ligne, il ne faudrait pas que ces mêmes libraires se défassent de leur propre documentation. Bertrand, du bibliomane moderne, l'évoquait avec le sourire mais je ne suis pas sûr qu'il n'y pense pas quelquefois en se rasant le matin… Je vous livre son commentaire " Intéressant tout ça ! Vraiment ! Il y aurait là un bon sujet de conférence pour les tables rondes du SLAM pendant le Grand Palais, non ? Eh ben vous savez quoi, de savoir tout ça et bien je crois que je vais illico mettre en vente ma documentation papier devenue obsolète... Brunet, Graesse, catalogue Rothschild, Grand-Carteret, Biographie Michaud, tout va y passer !! Qu'on se le dise !! Tout est à vendre !! "


Jean-Paul, vieux sage parmi les sages, a bien essayé de l'en dissuader mais je pense que c'était pour empêcher de voir les SVV inondées de ce type de matériel bibliographique pendant qu'il bradait le sien (477 € à Reims) : " Bertrand, ne fais jamais ça, tu le regretteras jusqu'à la fin de tes jours... Les livres de documentation restent des livres : Quelle différence que de feuilleter le Graesse papier et chercher sur l'écran la page 152 du tome III !"


Il se trouve que j'ai quelques ouvrages de bibliographie qui peuvent encore intéresser les libraires. Si notre jeune ingénieur se propose de piller notre patrimoine français et l'ensemble des informations confidentielles détenues par les SVV, on peut imaginer qu'il laissera aux libraires l'ensemble de la littérature étrangère qui leur permettra, en dernier ressort, de ne pas vivre dans le dénuement le plus total…


L'ouvrage que je vous présente est donc un document bibliographique de la littérature en langue italienne avant 1726. Je ne parle pas bien l'italien mais la page de titre mentionne, et j'ai pu le vérifier, que les notices des ouvrages sont fournies avec leur prix d'achat en regard ce qui en fait un recueil tout à fait intéressant. Cet ouvrage est attribué à Nicola Francesco Haym (1678/1729) , violoncelliste, librettiste, compositeur d'opéra, gestionnaire de théâtre et numismate. Italien d'origine allemande, il s'installe et finira ses jours en Angleterre. Il est connu pour sa riche collaboration avec Giovanni Bononcini et Georg Friedrich Haendel au niveau musical et pour ce catalogue, bien connu en Italie. Pierre


HAYM (Nicola Francesco). Biblioteca italiana o sia notizia de' libri rari nella lingua italiana. Divisa in quattro parti principali, cioé Istoria, poesia, prose, arti e scienze. Annessivi tutto il libro dell'eloquenza italiana di . Giusto Fontanini col suo ragionamento intorno alla stessa materia. A Venise et Milan, chez Michel Antonio Panza, 1741. Reliure plein veau marbré d'époque, dos à cinq nerfs orné de motifs dorés dans les caissons, pièce de titre en lettres dorées sur maroquin cerise, coupe à deux filets et toutes tranches rouges, Joli papier coloré de type "marbré coquille" caractéristique du 18eme siècle en pages de garde. [2 bl], [7ff avec pièce de titre et table alphab], 266p, [2 bl]. L'index est en page 1 et l'ouvrage se termine par une table complète. Il est indiqué, dans la page de titre qu'une annexe de Mgr Fontanini sur l'éloquence est ajoutée à cette deuxième édition. Le livre est divisé en histoire, poésie, prose, arts et sciences, avec un appendice d'ouvrages sur la rhétorique. Coiffes absentes, mors fatigués mais ouvrage en bon état général. Vendu


mercredi 23 mars 2011

Hippolyte Mettais. "Paris avant le déluge"...mais où il est question de l'Atlantide.

Paris avant le déluge par Gustave Doré

Les Atlantes habitaient, il y a longtemps, un archipel dont une des îles s'appelait Atlantis. Ils avaient doté leur capitale, éloignée de cinq milles de la mer, d'un port artificiel remarquable. Mais comme les Atlantes tentèrent de s'emparer d'une partie de la Grèce, Posséidon, le dieu de la mer, décida de les châtier. Il provoqua des tremblements de terre et des tsunamis qui engloutirent l'Atlantide et les autres îles. Voilà pour les faits !


Pour Platon, aucun doute, l'histoire de l'Atlantide qui "disparut sous la mer en un seul jour et une seule nuit" est vraie. Il précise: "Cette histoire, bien qu'étrange, est certainement vraie puisqu'elle a été relatée par Solon, le plus ancien des sept sages." A la fin du Moyen-Age, les Turcs s'emparent de Constantinople chassant ainsi les savants grecs. Ces derniers remettent à la mode les textes de Platon et l'imprimerie fait le reste. A cette même époque, débute, avec Colomb, Cartier, Cabot, l'ère des grandes découvertes et on se souvient des textes de Platon. Ce dernier écrivait que "au-delà du détroit de Gibraltar, il y avait eu une grande île et, plus loin, un continent". Aussi, la découverte d'un nouveau continent, l'Amérique, cause un choc chez les savants qui y voient la preuve des écrits de Platon.


En 1882, Ignatius Donelly écrit Atlantis, Myths of the Antediluvian World ? Le succès du livre est phénoménal. Cinquante éditions se succèdent et l'ouvrage circule parmi tous les amateurs de mystères. En fait, on prétend toujours que l'Atlantide n'est pas là où on la cherche. On la situe au Maroc, au Sahara, en Sibérie et même en Belgique ! Pourquoi pas à Tarascon, aussi ? Lorsqu'on découvre qu'une chaîne de montagnes existe bel et bien au milieu de l'Atlantique Nord et que des îles comme les Acores sont les sommets émergeants de chaînes de montagnes englouties, les rumeurs repartent de plus belle. Mais depuis les années 1960, on s'est demandé aussi si on ne cherchait pas l'Atlantide trop loin…


Et justement, la civilisation crétoise est redécouverte au début de ce siècle avec les fouilles de l'archéologue Arthur Evans. Les anciens Grecs l'avaient complètement oubliée et ne se souvenaient vaguement que de quelques mythes, celui du Minotaure, du fil d'Ariane, des combats de taureaux, etc. Or, les fouilles archéologiques révèlent une civilisation agréable, pacifique, avec des maisons familiales à deux ou trois étages, l'eau courante et l'électricité (non! Là, je blague). La civilisation crétoise était le centre d'un vaste empire qui a été frappée par une mystérieuse catastrophe vers 1500 avant Jésus-Christ. Des fouilles effectuées près de la Crète, sur l'île de Thera, appelée Santorin, ont montré que l'île aurait subi une gigantesque inondation. L'énigme est-elle résolue? Pas pour ceux qui veulent continuer à croire en la mythique Atlantide. L'ouvrage du Dr Mettais est de ceux-là.


Hippolyte Mettais, (1812- ?), est un médecin et homme de lettres, auteur de comédies, de romans d'anticipation et d'études historiques. Dans cet ouvrage, il reprend le thème, avant tout comme un sujet de science-fiction, genre narratif qui met en scène des univers où se déroulent des faits impossibles ou non avérés pour l'époque. On dit quelquefois que Mettais est le précurseur du genre. C'est oublier ses deux principaux pères fondateurs : Jules Verne avec De la Terre à la Lune en 1865 ou 20 000 lieues sous les mers en 1870, et H.G. Wells avec notamment La Machine à explorer le temps (1895), L'Homme invisible (1897) ou La Guerre des mondes (1898). Cet ouvrage fait partie d'un genre bibliophilique à part entière.

On est, ici, loin des bandes dessinées emblématiques de ce type de littérature… Pierre


METTAIS (H). Paris avant le déluge. Paris, Librairie centrale, 1866. In-12, reliure percaline grise, pièce de titre en lettres dorées sur fond de cuir rouge, 282 pp. Edition originale. Curieux roman antédiluvien rattachant la mythique Atlantide au lointain passé de la Gaule. Traces de mouillures claires en fin d'ouvrage. Bel état général. 35 €+ port

mardi 22 mars 2011

Un livre que les parisiens vont adorer : "Le bas du pavé parisien" par Guy Tomel.














Guy Tomel, (1855-1898), rédacteur au Journal des Débats, auteur d'ouvrages sur Paris, nous offre, aujourd'hui, un ouvrage assez peu fréquent à la vente, bien illustré et dont le thème est original : Le bas du pavé parisien. On imagine la gouaille des intervenants dans ses portraits bien tournés !











Fort de sa bonne connaissance du milieu parigot, il nous présente, au travers de quelques témoignages, un voyage dans le Paris populaire de la fin du 19eme siècle. On est loin des boulevards Haussmanniens et des problèmes de cœur des grisettes, ici. La misère est présente à chaque ligne mais la dignité et l'honneur, aussi. La première partie est consacrée aux petits métiers de Paris. Certains métiers intriguent comme ces loueurs de viande, ces anges-gardiens à la morale si haute, ou ces chasseurs de rats à la réputation si basse…











La deuxième partie nous relate la vie autour de la préfecture avec des détails très réalistes sur le monde du crime et de la police. Comment arrêter un voleur, comment immobiliser un bourgeois pour lui arracher sa montre, enfin toute une série de détails pratiques à l'attention des Vidocq et des Cartouches de la fin du siècle... L'auteur nous explique la technique du camouflage, les trucs de cambrioleurs, le monde des tripots et celui des objets perdus. Autant de chapitres bien utiles aux gendarmes et aux voleurs, donc !











Cet ouvrage vous sera-t-il utile dans votre pratique quotidienne de l'arnaque, aujourd'hui ? J'en doute. La criminalité a bien changé et la spécificité des bas fonds parisiens a disparu avec la construction des grands blocs d'habitation dans toutes les banlieues. Cet ouvrage est néanmoins instructif en ce qu'il nous présente tous les codes en vigueur, à cette époque, chez les "Titis" parisiens. Je viens de finir de le lire. Un régal ! Pierre











TOMEL (Guy). Le bas du pavé parisien. Paris, Charpentier & Fasquelle, 1894, in 12, de 272pp et 89 illustrations in texte et à pleine page. Reliure demi-basane verte, dos lisse avec filets aux faux nerfs et pièce de titre en lettres dorées. Couverture illustrée conservée. L'auberge à 4 sous, bagotiers, chasseurs de rats, loueurs de viande, chienneurs, ravitailleurs de laboratoire, coups d'escarpes (le vol à l'esbroufe, le coup de la bascule, de pante, du Père François, etc…), camouflage, cambrioleurs, tripots, objets perdus, etc… Bel état Vendu